Depuis quelques mois, l’information de la mutation du DELF et du DALF circule et provoque angoisses et inquiétudes. Le DELF et le DALF vont changer, comment va-t-on préparer nos candidats ? Comment allons-nous corriger ?… Mais est-ce une réelle modification ? Pas si sûr! Il ne s’agit pas d’une remise à neuf de ces diplômes mais d’une réorganisation pour un alignement sur les niveaux du CECR. Mais quels niveaux ?

Hé bien les mêmes que ceux qui définissent, ou sont censés définir, l’enseignement du français dans les établissements scolaires et universitaires. Le niveau Matura doit en principe correspondre au niveau B1 du CECR…

Ces niveaux sur lesquels s’alignent les nouveaux DELF et DALF ne sont donc pas si inconnus. Reste à les utiliser, à s’y appuyer pour préparer les candidats aux épreuves et tant qu’à faire l’ensemble des élèves et des étudiants. Cela leur permettra de pouvoir se situer en fonction d’une échelle commune. Peut-être faudra-t-il revoir un peu les programmes des méthodes utilisées, peut-être faudra-t-il aussi adapter sa manière d’évaluer les productions des apprenants, peut-être faudra-t-il axer davantage son enseignement sur les objectifs du CECR, c’est à dire des objectifs de compétence, d’action et d’interaction en langue.

Mais quels sont ces niveaux ? Quel est ce CECR?

Le CECR, cadre européen commun de référence existe depuis environ 10 ans et a été élaboré par des équipes de linguistes et de didacticiens en langue soucieux de promouvoir les compétences linguistiques des Européens.

Afin de faciliter la mobilité européenne des élèves, des étudiants et des adultes, il fallait créer un outil capable d’évaluer ces compétences selon des niveaux reconnus par tous. Jusqu’à présent, il existait autant de niveaux différents que d’échelles d’évaluation, toutes différentes et mettant l’accent sur des compétences et des connaissances diverses; selon les cas, l’oral, l’écrit ou la grammaire était l’aspect le plus important.

Les équipes du conseil de l’Europe ont d’abord étudié les échelles existantes1 et ont élaboré un outil commun entre les plus grandes échelles. Des niveaux de compétence ont ainsi été mis en place et des descripteurs ont été détaillés pour chaque niveau et chaque compétence.

L’échelle ainsi élaborée met en avant 3 niveaux principaux, subdivisés chacun en 2 sous-niveaux qui ont également été affinés.

Les niveaux A (A1 et A2) concernent les utilisateurs élémentaires, les niveaux B (B1 et B2) les utilisateurs indépendants ou autonomes, et les niveaux C (C1 et C2) les utilisateurs expérimentés.

La description générale de ces niveaux est la suivante2 :

UTILISATEUR ÉLÉMENTAIRE

A1 : Peut comprendre et utiliser des expressions familières et quotidiennes et des phrases très simples qui visent à satisfaire des besoins simples et concrets. Peut se présenter ou présenter quelqu’un et poser à une personne des questions la concernant – par exemple son nom, son lieu d’habitation, ses relations, ses biens, etc. – et peut répondre au même type de questions. Peut communiquer de façon simple si l’interlocuteur parle lentement et distinctement et se montre coopératif.

(niveau de “découverte” correspondant environ à 150h3 d’apprentissage)

A2 : Peut comprendre des phrases isolées et des expressions fréquemment utilisées en relation avec des domaines immédiats de priorité (par exemple, des informations personnelles sur des achats, le travail, l’environnement familier). Peut communiquer dans une situation courante simple ne comportant qu’un échange d’informations simple et direct, et sur des activités et des sujets familiers. Peut décrire avec des moyens simples une personne, un lieu, un objet, sa propre formation, son environnement et évoquer une question qui le/la concerne.

(niveau de “survie” correspondant environ à 300h d’apprentissage)

UTILISATEUR INDÉPENDANT

B1 : Peut comprendre les points essentiels quand un langage clair et standard est utilisé et s’il s’agit de choses familières dans le travail, à l’école, dans les loisirs, etc. Peut se débrouiller dans la plupart des situations linguistiques rencontrées en voyage dans le pays de la langue cible. Peut produire un discours simple et cohérent sur des sujets familiers et dans ses domaines d’intérêt. Peut raconter un événement, une expérience ou un rêve, décrire un espoir ou un but et donner de brèves raisons ou explications pour un projet ou une idée.

(niveau “seuil” correspondant environ à 450h d’apprentissage)

B2 : Peut comprendre le contenu essentiel de sujets concrets ou abstraits dans un texte complexe; comprend une discussion spécialisée dans son domaine professionnel. Peut communiquer avec un degré de spontanéité et d’aisance tel qu’une conversation avec un locuteur natif ne comporte de tension ni pour l’un ni pour l’autre. Peut s’exprimer de façon claire et détaillée sur une grande gamme de sujets, émettre un avis sur un problème et donner les avantages et les inconvénients de différentes possibilités.

(niveau d'”autonomie” correspondant environ à 600h d’apprentissage)

UTILISATEUR EXPÉRIMENTÉ

C1 : Peut comprendre une grande gamme de textes longs et exigeants, ainsi que saisir des significations implicites. Peut s’exprimer spontanément et couramment sans trop apparemment devoir chercher ses mots. Peut utiliser la langue de façon efficace et souple dans sa vie sociale, professionnelle ou académique. Peut s’exprimer sur des sujets complexes de façon claire et bien structurée, décrire ou rapporter quelque chose et manifester son contrôle des outils d’organisation, d’articulation et de cohésion du discours.

(niveau d’ “efficacité” correspondant environ à 750h d’apprentissage)

C2 : Peut comprendre sans effort pratiquement tout ce qu’il/elle lit ou entend. Peut restituer faits et arguments de diverses sources écrites et orales en les résumant de façon cohérente. Peut s’exprimer spontanément, très couramment et de façon différenciée et peut rendre distinctes de fines nuances de sens en rapport avec des sujets complexes. (niveau de “découverte” correspond environ à plus de 900h d’apprentissage)

Ce descriptif général qui met en avant les compétences de communication s’accompagne de détails supplémentaires. Ainsi l’évaluation d’un niveau prend en considération les points suivants :

Activités communicatives :

  • Réceptions orales et écrites

  • Interactions orales et écrites

  • Productions orales et écrites

  • Médiations orales et écrites

Compétences communicatives

  • Pragmatique (utilisation de la langue) (aisance, souplesse, cohérence, précision…)

  • Linguistique (ressources linguistiques) (étendue et maitrise du vocabulaire, de la grammaire, de la prononciation)

Stratégies de communication

En réception, interaction et production

  • Planning (prévoir), exécution (essayer, coopérer…), évaluation (vérification…), remédiation (faire clarifier, autocorrection…)

Compétences socio-culturelles

Comme on le voit les places de la grammaire et du lexique ne sont pas au premier plan et sont considérés comme des “outils” utiles à la communication et non comme un moyen de communiquer.

Bien entendu, des descripteurs plus détaillés ont été élaborés pour chaque niveau et chacun des points évoqués ci-dessus.

D’autre part le CECR apporte des informations supplémentaires sur les thèmes de description et de narration qu’il est possible d’aborder en fonction des niveaux de compétence :

A1: lieu de vie

A2 : les gens, leur apparence, formation, métier, lieux et conditions de vie, objets personnels, animaux familiers, événements et activités, ce qui plaît / ne plaît pas, projets / organisation, habitudes / coutumes, expérience personnelle

B1 + B2 : intrigue d’un livre/film, expériences, réactions, rêves, espoirs et ambitions, raconter une histoire, détails de base dans une circonstance imprévisible par exemple un accident

C1 + C2 : description claire et détaillée de sujets complexes

Tous ces descriptifs sont des soutiens à l’élaboration des cours mais aussi aux évaluations à mettre en œuvre afin de mesurer les niveaux de compétences des apprenants.

Les nouvelles épreuves des DELF et DALF ne mesureront pas autre chose. En cela elles s’alignent sur l’échelle du CECR, comme le sont plusieurs examens nationaux de langue dans divers pays européens.

Mais il ne s’agit pas de faire apprendre aux apprenants des phrases ou des dialogues tout prêts, reprenant ainsi le modèle traditionnel de l’enseignement des langues d’avant les années 60. Il s’agit d’évaluer des compétences et non pas des connaissances. Les compétences s’acquiert par entraînement, par exposition aux situations et non par apprentissage par cœur.

Dans cette optique, le CECR préconise un enseignement ou les apprenants sont considérés comme des acteurs sociaux ayant à accomplir des tâches dans des circonstances et un environnement donnés, à l’intérieur d’un domaine d’action particulier, c’est-à-dire un enseignement où l’apprenant est continuellement en situation de communication.

C’est ce qu’évaluent toujours le DELF et le DALF : les compétences de communication.

Nota bene : le CECR et les grilles d’auto-évaluation sont téléchargeables à l’adresse suivante :

http://culture2.coe.int/portfolio/

1 Voir à ce sujet l’article “Des systèmes d’évaluation en FLE” sur Edufle.net, http://www.edufle.net/article50.html

2 Un cadre européen commun de référence pour les langues, apprendre, enseigner, évaluer. Conseil de l’Europe, 2000

3(le nombre d’heures indiqué est approximatif mais il permet d’avoir une idée de temps d’apprentissage nécessaire à l’obtention des niveaux. Il s’agit bien sûr d’1h de 60mn!!)

 

 

 

 

Publié dans l’Apfascope n°39, journal de l’association des professeurs de français en Autriche

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